mardi 17 décembre 2019

Nous allons définir brièvement ce qu’est le Convivialisme puis indiquer ce qui mène du premier au second Manifeste avant de préciser quelle espérance il fait naître.

Le Convivialisme est une approche philosophique résolument relationnelle du monde, de la vie, de la vie humaine avec l’objectif de dire comment cette vie peut devenir, pour tous les êtres humains, une vie bonne, au sein d’un société bonne (au sens que donnait à ce terme John Galbraith (1996) The Good Society – The Humane Agenda).

Il est difficile de définir la Civic tech, du fait de l’évolution rapide des technologies numériques, et donc de l’expansion continue de son domaine d’application. De plus, une telle définition serait à refaire pour chaque type d’usage, tant sont différentes, et souvent opposées, les finalités de ces applications, selon les catégories d’acteurs qui se l’approprient, et les objectifs qu’ils se fixent. L’absence d’accaparement par des instances de pouvoir (politique ou économique), ou de barrières d’entrée dissuasives, est d’ailleurs une des caractéristiques fondamentales de ces technologies.

 A lecture by Marc Humbert (Vienna University of Technology, June 4th, 2015)

Good afternoon. My name is Marc Humbert, I am a professor of political economy at University of Rennes, Brittany, France. As a co-author of the French Convivialist Manifesto[1], I have been invited to debate with you about our common future, taking this Manifesto as a starting point. This invitation came from Pr Wolfgang Hofkirchner. I thank him very much for that opportunity to speak in this terrific summit, a summit gathering such a grand audience. His invitation came through the recommendation of Frank Adloff, and I thank him too. He is the promoter of the convivialist manifesto in Germany[2] and we are here in tandem to discuss the theme of this session: how do we want to live and how do we get there?

Je traite donc à ma manière du thème de cette journée d’étude qui questionne une passion humaine : le désir d’avoir plus ou la soif de possession. Je souligne d’abord que cette passion concerne les comportements individuels (A), l’éthique personnelle, la morale individuelle, depuis la nuit des temps. Mais que cette passion concerne aussi le fonctionnement d’ensemble de la société (B) : comment assurer une certaine stabilité dans une société où tous poursuivent sans concession leur soif de possession ? Je rappelle que la solution n’a pas toujours été la même. En particulier quelque chose a changé au 18ème siècle. Dont l’effet a été hyper-amplifié par un bouleversement inattendu (C). Enfin je soutiens l’idée que c’est cela qui est la source de la menace qui s’aggrave sur la survie de l’humanité et que c’est cela qui doit être maîtrisé pour espérer instaurer une civilisation de convivialité (D).

 

Introduction

For those wishing to attempt to define individualism today, Weber’s exhortation to take into account the complexity of this concept[i] is still extremely topical since the term is laden with diverse and protean meanings depending, as pointed out by Steven Lukes,[ii] on the historical, ideological or even geographical context in which it is used. At times exalted, at times condemned, with an intricate core of anthropological and political, social and moral problems, individualism seems to be liable to a multitude of positions and interpretations, among which it is anything but easy to take a position unless we choose a privileged point of view to reread it from.

La discussion sur l’Europe est au point mort. Et ceci dans toute l’Europe. Sans doute parce que, alors que rien ne va plus, chacun ressent qu’il est tout aussi impossible d’avancer dans sa construction que de faire machine arrière. Confrontée à cette impasse, la pensée se bloque. On voudrait ici se risquer à examiner certains contours de cette impasse en se demandant s’il n’y a pas quelque part, malgré tout,  une issue de secours.

Care of the World. Fear, Responsibility and Justice in the Global Age, Springer, Dordrecht     2012

 Introduction. The ambivalence of globalization

  Amor mundi – why is it so difficult to love the world?

Hannah Arendt, Denktagebuch, March 1955

  1. Global unification and local fragmentation

 

The definitions and metaphors used to describe that unprecedented and ungraspable process that we call ‘globalization’ at this point number many. What I would like to propose here, while drawing from the lexicon of Marcel Mauss, is to consider globalization as a ‘total social fact’. Thus I not only allude to the fact that it affects the whole social fabric and all spheres of existence (economic, cultural, political and symbolic), but also to the fact that its distinctive characteristic is its creation of an interdependence of events which makes all sectoral and partial viewpoints obsolete.[1] However, this does not mean that globalization is a unitary and uniform phenomenon. On the contrary, it appears characterized by a constitutive ambivalence, namely by the coexistence of contrasting and complementary dimensions creating a scenario that is only apparently paradoxical. In this sense, I totally agree with the well-known thesis of ‘glocalization’ put forward by Robertson,[2] insofar as he effectively stresses the joint presence of ‘global’ processes of unification, homogenization and homologation on one hand, and ‘local’ processes of fragmentation, division and differentiation on the other. A large part of contemporary sociological and philosophical reflection[3] tends to give credit to this thesis, and indeed shows the inseparability of the two poles in the global/local pairing, linked, as recently repeated,[4] not only by an evident coexistence, but by a binding co-belonging.

https://blogs.mediapart.fr/thomas-coutrot/blog/260618/monnaie-fiscale-complementaire-sortir-des-impasses-europeiste-et-souverainiste

Monnaie fiscale complémentaire : sortir des impasses européiste et souverainiste

Donner de l’oxygène aux pays étouffés par l’austérité en créant une monnaie nationale parallèle à l’euro ? En Italie, les deux partis au pouvoir l’avaient annoncé mais semblent y avoir renoncé. Au contraire de leur projet, le nôtre veut non pas préparer une sortie de l’euro mais ouvrir le champ des possibles, vers une refondation démocratique du projet européen. Par Bruno Théret et Thomas Coutrot

Le choix d'une transition vers des sociétés du "buen vivir" et la construction d'un mouvement "convivialiste" rencontre un écho important dans nombre de mouvements écologistes, sociaux et citoyens. il constitue une référence théorique qui permet, comme l'affirme le projet des "Dialogues en Humanité" de considérer la question humaine, et sa difficulté, comme la première question politique. C'est bien en effet la difficulté du "vivre ensemble" la condition humaine, donc du con-vivere qui conduit aux formes multiples de maltraitance par lesquelles l'humanité se mutile elle même, et entretient un rapport guerrier a la nature et aux autres êtres vivants. 

 

 L’intention de cette communication est de proposer une lecture critique du projet Européen du point de vue du convivialisme. Il convient évidemment de commencer par une présentation de ce qui constitue ce point de vue, ces « lunettes » encore peu connues[1] mais avec lesquelles on peut porter un regard critique et constructif sur les sociétés. Le convivialisme est l’expression d’un socle doctrinal sur lequel devrait s’élaborer, ou que devrait comporter, toute philosophie morale et politique servant de guide à la conduite d’une société pour que celle-ci soit, aux yeux de ceux qui sont favorables à l’adoption de ce socle, une « bonne société », une société conviviale.

On verra toute l’attention apportée par le convivialisme à la formation d’une communauté politique et au dépassement de l’hubris[2], c’est-à-dire à la volonté de faire vivre une communauté où a été dépassé l’encouragement collectif à la démesure, pour se tourner vers autre chose qu’un objectif de puissance et de croissance économique, perpétuelle. Quand nous en viendrons à l’examen du projet européen, il y aura donc lieu de déceler quel genre de communauté politique il propose et quel encouragement collectif celle-ci promeut. L’écart avec le convivialisme, on le verra, est grand. On terminera par des suggestions de réformes pour rapprocher le rêve d’Europe de réalisations qui soient conviviales.

(project)


Introduction.

Throughout its very long history, humanity has grown and spread throughout its small corner of the universe by the formation of organised groups of people and communities, peoples and States between which relations have often had dramatic consequences. This universal declaration recognises that life is an essential value that proceeds from the interdependency between people, groups, communities, peoples, States and the natural environment. The universal aspiration of every being and person for freedom and equality can potentially find a right response in the recognition and respect by all of interdependency. This respect requires us to practice conviviality to organise good societies and ensure the peace of humanity within the universe. It cannot be created without the observation of a certain number of rules and adherence to the convictions of the articles below.
 

Construire une société convivialiste est un impératif catégorique : ce n’est rien moins que la survie  d’une certaine idée de l’humanité, voire de l’humanité tout court, qui est en jeu.  Le mouvement convivialiste est donc indispensable, car on n’aperçoit guère d’autre courant de pensée à la hauteur d’un tel défi. Pourtant, malgré le foisonnement des contributions, toutes aussi riches les unes que les autres, il est douteux qu’il soit encore suffisamment armé pour une telle mission. C’est sur le chemin qu’il lui reste à parcourir que portera cette réflexion.

(projet)

Préambule

Au cours de sa très longue histoire, l’humanité s’est déployée dans un petit coin de l’univers, formant des groupes organisés de personnes, de communautés, de peuples, d’États entre lesquels les relations ont souvent été dramatiques. Cette déclaration universelle reconnaît que la vie est une valeur essentielle qui procède d’une interdépendance générale entre les personnes, les groupes, les communautés, les peuples, les États et les composantes de l’environnement naturel. L’aspiration universelle de chaque être, de chaque peuple, à la liberté et à l’égalité peut trouver une réponse ressentie comme juste dans la reconnaissance et le respect par tous de cette interdépendance généralisée. Ce respect exige de pratiquer la convivialité pour organiser des sociétés bonnes et assurer la paix à l’humanité au sein de l’univers. Elle ne peut se faire sans l’observation d’un certain nombre de règles et l’attachement à des convictions qu’énoncent les articles ci-après.

Un constat inquiétant

L’équation insoluble


Nous nous trouvons devant un problème, que nous ne savons pas résoudre, dans le cadre de l’économie classique. Elie Cohen parle « d’équation insoluble ». Comment concilier une croissance proche de zéro, un endettement fragilisant toutes les économies, la lutte contre un chômage commençant à faire monter l’extrême droite un peu partout, une montée des inégalités dans quasiment tous les pays, générant entre autres, un rejet très fréquent de tout accueil de migrants. La peur de la régression sociale et la redistribution des cartes en géopolitique font perdre ses repères à l’occident.

Présentation

Par Alain Caillé et Philippe Chanial 

En juin 2013 paraissait (au Bord de l’eau) un petit livre intitulé Manifeste convivialiste. Déclaration d’interdépendance. Signé par 64 intellectuels français ou étrangers (rejoints par une cinquantaine d’autres depuis), il a déjà été traduit, au moins sous sa forme abrégée, dans une dizaine de langues. Son premier mérite est d’exister. Sa parution montre qu’avec de la volonté il est possible de surmonter les clivages, trop nombreux et qui nous condamnent à l’impuissance, qui séparent encore tous ceux qui partout à travers le monde s’opposent pratiquement ou/et intellectuellement au règne du néolibéralisme et du capitalisme rentier et spéculatif en dessinant les contours d’un monde post-néolibéral. Ces auteurs représentent à titre personnel des courants de pensée, des réseaux associatifs, des réseaux de réseaux etc. très variés. Pour en rester à la France : l’Appel des appels, ATTAC, Dialogues en humanité, FAIR (le Forum pour d’autres indicateurs de richesse), les États généraux de pouvoir citoyen, le Laboratoire de l’économie sociale et solidaire, le Pacte civique, les revues ou magazines Alternatives économiques, Multitudes, La Revue du MAUSS, une frange du patronat alternatif, etc.

La situation semble désespérante. L’offensive des droites et des extrêmes droites occupe l’espace et les esprits. Elle s’étale dans les médias et prétend exprimer la droitisation des sociétés. Il n’en est rien et rien n’est joué. Les sociétés résistent et les contradictions sont à l’œuvre ; ce sont elles qui déterminent l’avenir.

Pour comprendre la situation, repartons de la citation de Antonio Gramsci : « Le vieux monde se meurt, le nouveau monde tarde à apparaître et dans ce clair obscur surgissent les monstres »[1].

Dans ce contexte, la stratégie des mouvements sociaux qui veulent porter un projet d’émancipation doit articuler la réponse à l’urgence et la construction d’un projet alternatif d’avenir. Ils doivent dans le même temps lutter contre les monstres et s’inscrire dans la construction d’un monde nouveau.

Dans le langage courant, l’expression « intérêt général » s’est progressivement substituée à celle de « bien commun ». Glissement à première vue sans importance puisque les deux expressions sont souvent considérées comme synonymes. Pourquoi les distinguer ? Pourquoi la philosophie politique devrait-elle donner, ou redonner place à la notion de « bien commun » et repenser celle-ci ? La commission européenne a publié en 2004 un Livre vert sur les services d’intérêt général. Ceux-ci, est-il précisé dans la synthèse, « touchent à la question centrale du rôle joué par les autorités publiques dans une économie de marché, à savoir, d’une part, veiller au bon fonctionnement du marché et au respect des règles du jeu par tous les acteurs, et d’autre part, garantir l’intérêt général, notamment la satisfaction des besoins essentiels des citoyens et la préservation des biens publics lorsque le marché n’y parvient pas. » Le postulat implicite, ici comme à chaque page du texte, est que l’économie constitue la base de la société. Étant aujourd’hui partagé par l’ensemble de la classe politique et des économistes, qu’ils soient de droite ou de gauche, ce postulat passe pour une évidence première. Toute pensée politique rationnelle se doit de l’admettre. Dans ces conditions, la notion d’intérêt (particulier ou général) s’impose, elle est nécessaire et suffisante. Le discours politique peut à la rigueur parler de bien-être, mais il est entendu2 qu’il n’a pas à se prononcer sur le bien : le bien relève de la sphère privée. En faire usage dans le champ politique, ne serait-ce pas glisser vers une forme de pensée totalitaire ?

Nous autres, citoyens de la Terre, d’Afrique, des Amériques, d’Asie, d’Europe ou d’Océanie, de France ou d’ailleurs,  de nos villes et de nos banlieues, de nos cités, de nos quartiers ou de nos favelas,  de nos campagnes, de nos provinces ou de nos régions, de nos vallées ou de nos plaines, de nos côtes ou de nos montagnes,

Croyants ou incroyants, musulmans, bouddhistes, chrétiens, juifs, hindouistes, taoïstes, animistes, agnostiques, athées, etc.

Libéraux, socialistes, anarchistes, communistes, républicains, patriotes ou/et cosmopolites, décroissants, a-croissants, croissantistes éclairés, etc.

Nous avons en partage notre refus absolu, inconditionnel et résolu, viscéral et mental, passionné et raisonné de tout ce qui menace la dignité humaine, la paix, l’harmonie, la beauté et la survie du monde, et la responsabilité, contre les terribles forces de destruction et de chaos qui nous assaillent, de tout faire pour créer les conditions de possibilité d’une belle démocratie et de jours plus heureux.

Par Alain Caillé

 

Chers amis,

Comme après chacune de nos séances je crois utile de vous proposer un CR subjectif, forcément subjectif, non pas de tout ce que nous avons dit mais de ce qui m’a le plus frappé et que j’en retiens quant à moi. L’exercice est particulièrement difficile dans le cas présent puisque nous avons eu une séance très riche en matière de ressenti des uns et des autres mais à aucun moment de véritable discussion structurée. Comme si le sujet était trop immense et complexe et qu’on ne savait trop par quel bout le prendre. Contrairement aux autres séances, tout le monde n’est pas intervenu. Comme si certains ne savaient trop quoi dire, ne voyant pas clairement, sans doute, où étaient les questions et où les réponses. Peut-être parce que nos deux orateurs principaux, Jean-Claude Guillebaud et Jean Baubérot ont choisi d’aborder le sujet en nous faisant part de leur expérience personnelle et non par un biais théorique ou conceptuel. Choix judicieux parce qu’il a permis de partager des émotions – j’étais au bord des larmes, comme lui-même je crois, à certains moments de l’exposé de Jean-Claude. Mais choix frustrant, aussi, pour ceux qui comme moi, espéraient pouvoir monter en généralité théorique sur le sujet, comme je le crois indispensable. Comment prétendre défendre une philosophie du vivre-ensemble si nous ne précisons pas les modalités d‘un vivre ensemble possible des différentes cultures entre pays, Etats ou continents différents, ou au sein même de ces pays ? Le compte-rendu que je vous propose, très infidèle, sera principalement orienté par cette question.

Entretien avec Pablo Servigne et Raphaël Stevens sur www.bastamag.net

Sur les neuf frontières vitales au fonctionnement du « système Terre », au moins quatre ont déjà été transgressées par nos sociétés industrielles, avec le réchauffement climatique, le déclin de la biodiversité ou le rythme insoutenable de la déforestation. Transgresser ces frontières, c’est prendre le risque que notre environnement et nos sociétés réagissent « de manière abrupte et imprévisible », préviennent Pablo Servigne et Raphaël Stevens, dans leur livre « Comment tout peut s’effondrer ». Rappelant l’ensemble des données et des alertes scientifiques toujours plus alarmantes, les deux auteurs appellent à sortir du déni. « Être catastrophiste, ce n’est ni être pessimiste, ni optimiste, c’est être lucide ». Entretien.

Pourquoi un post-capitalisme, et pourquoi Keynes ? Le mot effraie ; l’économiste en revanche rassure. Trouver un lien pourrait être l’occasion de frayer un chemin vers un mode de production et de consommation moins exposé aux crises, aux distorsions et aux injustices que le nôtre. Le postcapitalisme demeure associé aux utopies les plus diverses, tels les phalanstères fouriéristes ou le village New Harmony de Robert Owen1. Si ces projets peuvent séduire quelques individus isolés, ils paraissent difficilement applicables à une nation entière. L’incapacité de plusieurs, pour ne pas dire de tous, à penser une théorie post-capitaliste qui soit viable, disons raisonnable, et par là politiquement envisageable à l’échelle de la nation ne devrait cependant pas nous masquer son absolue nécessité. Certaines des objections au système capitaliste relevées par les penseurs anti ou post capitalistes depuis le XIXème siècle ont montré leur utilité, qu’il s’agisse de l’absence de dimension sociale du premier capitalisme industriel dénoncé par Pierre Leroux et les socialistes français, ou des carences écologiques de nos modèles théoriques contemporains dont les théoriciens de la décroissance ont montré le caractère indépassable sans sortir du modèle capitaliste.

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