À l’occasion du forum Educasport des 27 et 28 septembre 2015, l’APELS (Agence pour l’éducation par le sport) a pris l’initiative de lancer tout un processus de discussion auprès de nombreuses associations sportives soucieuses de leur mission éducative. Ce processus a abouti à la rédaction d’une charte du sport directement inspirée des principes défendus par le Manifeste convivialiste. En voici la première version. Espérons qu’elle donne des idées aux convivialistes investis dans d’autres champs. Pourquoi pas une Charte de l’éducation convivialiste ? de la justice convivialiste ? de la prison convivialiste ? de la ville convivialiste ? Etc.
La Charte d’engagement du Mouvement « Fais-nous Rêver »
Des valeurs de référence et des engagements communs pour un sport convivial, social et solidaire
Après 18 années d’appel à projets et le repérage de milliers d’initiatives et d’acteurs qui « changent la vie des autres par le sport », l’Agence pour l’Education par le Sport (APELS) a souhaité engager un travail de fond afin d’aller plus loin dans son rôle de passeur en formalisant, à partir du terrain, une philosophie de l’action en même temps qu’elle développait son expertise technique.
Parce que le sport a un pouvoir symbolique fort et qu’il irrigue toutes les sphères de la société, il a un rôle moteur à jouer dans l’invention d’une société nouvelle. Cela engage la responsabilité de tous les acteurs, en particulier des éducateurs dont le rôle est fondamental. En effet, le sport est aujourd’hui ambigu (aux mythes de l’égalité et de la progression au mérite, d’un sport pacificateur et intégrateur en soi, de l’effort physique nécessairement vecteur de joie et de santé, correspondent en miroir inversé les dérives de l’argent-roi et de la corruption généralisée, de la violence et de l’exclusion, de la souffrance et du dopage) et son impact éducatif et social dépend étroitement de la manière dont il est saisi.
Engagement moral mutuel, la Charte se veut donc avant tout un document de référence pour guider l’action des éducateurs sociaux et sportifs, des organisations associatives, publiques, et tout autre collectif structuré ou non, qui porte des projets où le sport revêt une dimension éducative, qu’elle soit de santé, d’insertion sociale, de formation professionnelle, de réussite scolaire ou agissant sur le mieux vivre ensemble.
Sa philosophie générale est née du Mouvement « Fais-nous rêver ». Elle traduit son ambition de transformation de la société et d’émancipation des jeunes - et moins jeunes - en utilisant toutes les potentialités du sport en termes éducatifs. Dans le contexte de crise totale que nous connaissons (politique, économique, sociale), elle trace le chemin pour s’extraire d’une société bloquée et rassembler les forces vives pour bâtir localement une société « conviviale », qui ne pourra pas être décidée d’en haut.
La présente Charte a été établie collectivement par les acteurs du réseau, dont l’engagement altruiste en réponse à des situations intolérables sur le terrain (et souvent créatif pour faire face aux nombreuses difficultés !) a fait émerger un nouveau secteur en lui donnant une réalité concrète. Elle consigne toutes les valeurs humanistes unissant les différents acteurs impliqués dans ce champ d’action.
Quatre principes
Quatre grands principes soutiennent cette Charte. Ses signataires s’engagent à les respecter et à les animer avec un souci permanent d’amélioration. Ils sont inspirés du Manifeste convivialiste cosigné ou endossé par une centaine d’intellectuels français et étrangers bien connus, à l’initiative d’Alain Caillé. Ce manifeste qui propose une nouvelle manière de vivre ensemble « en s’opposant sans se massacrer et en se donnant sans se sacrifier », énonce quatre principes :
Ø Principe de respect des différences
Ø Principe de richesse du lien social
Ø Principe d’épanouissement personnel
Ø Principe d’opposition créatrice
Ces quatre principes sont indissociables et se déclinent en plusieurs indicateurs proposés par l’Agence pour l’Education par le Sport. Ainsi, chaque signataire de la Charte s’engage par des actions concrètes sur au moins un indicateur par principe constitutif de la Charte.
Parce qu’elle vise à faire converger les énergies, la Charte doit être approuvée collectivement. Ses signataires se fixent des engagements de progrès partagés, qui doivent être revus et adaptés à intervalle régulier pour s’assurer que les principes sont toujours respectés. Enfin, il s’agit de la faire circuler et la faire signer par de nouveaux intervenants (joueurs, entraineurs, dirigeants, bénévoles et professionnels, partenaires, parents).
La présente version de la Charte est évolutive. Elle sera mise en débat et affinée avec le temps.
Charte du sport convivialiste
Je m’engage pour un sport convivial, social et solidaire, et j’adhère aux principes suivants:
Ø Principe de respect des différences
L’être humain est multiple, mais malgré ses « nuances » en termes de couleur de peau, de culture, de religion, de richesse, de sexe ou d’orientation sexuelle, d’âge, d’aptitude physique ou de rythme physiologique, il partage une commune faculté à s’épanouir dans le sport.
Le sport que nous défendons englobe et accueille tout le monde, il fait une place à chacun au-delà des représentations liées à l’activité. Il se décline en une diversité de pratiques et se déploie au sein d’un projet qui comporte plusieurs facettes.
Il crée un espace de mixité et de fraternité bienveillante, où chacun est libre de rester naturel et authentique, avec la sécurité d’être accepté pour ce qu’il est, avec ses forces comme avec ses faiblesses.
Il est fait une place centrale à la reconnaissance de l’altérité comme source d’enrichissement mutuel.
Chacun bénéficie d’une écoute équitable au sein du groupe et le groupe exerce une solidarité active envers chacun de ses membres en difficulté.
Ø Principe de richesse du lien social
L’être humain est un être social, qui a besoin de s’ouvrir aux autres pour s’épanouir. Sa plus grande richesse réside dans l’intensité de ses rapports sociaux et l’engagement pour les autres. Le don de soi dans le collectif, est une source de joie profonde.
Le sport que nous défendons ne place jamais la réussite sportive individuelle au-dessus du bien-être relationnel. Il incite au contraire à entrer dans le cycle de la générosité (apprendre à demander, donner, recevoir, rendre) et à s’occuper (prendre soin) de l’autre dans un esprit de réciprocité qui s’exprime dans et hors champ sportif. Il favorise l’alternance des positions, des missions et des rôles, la coopération et l’interpénétration de milieux différents, dans une approche interculturelle.
Le sport n’est pas appréhendé comme une fin en soi, autosuffisante, mais doit pouvoir ouvrir sur autre chose, sur d’autres lieux, sur d’autres personnes, sur d’autres cultures, bref, offrir de nouvelles perspectives.
La joie de participer à un collectif, et de veiller à son bon fonctionnement, va de pair avec la joie du sport.
Chacun est associé au fonctionnement du groupe et se soumet à la règle décidée en commun. L’identification d’espaces d’engagement dans le collectif permet à chacun de développer sa valeur humaine.
Ø Principe d’épanouissement personnel
Tout en s’engageant dans la vie de groupe, chacun a le droit d’exister pour lui-même, de se construire en tant qu’être humain unique et singulier, et de répondre aux aspirations qui lui sont propres.
Le sport que nous défendons valorise et fait grandir tout le monde en plaçant la personne au centre du projet sportif. Il permet à chacun de réaliser son plus haut potentiel, dans le présent et sans handicaper ses possibilités futures (la santé n’est jamais sacrifiée au résultat sportif).
Il encourage le développement d’une personnalité équilibrée par la recherche d’une harmonie entre le mental et le physique, la nature et le social.
Il renforce les capacités individuelles à faire ses propres choix, à fixer ses propres objectifs et à s’impliquer dans le collectif (formation citoyenne).
La joie de réaliser ses possibilités physiques va de pair avec celle de participer à un collectif, et de veiller à son bon fonctionnement.
Ø Principe d’opposition créatrice
Parce que l’être humain cherche à exprimer son individualité, il est naturel qu’il puisse s’opposer. Mais la rivalité doit être maîtrisée pour devenir féconde et non destructrice.
Dans le sport que nous défendons, le jeu prime sur l’enjeu. Il met en avant le plaisir de la pratique partagée, qui transforme l’adversaire en partenaire de jeu, la rivalité en amitié et l’opposition en une occasion de progresser ensemble. Cela passe par l’application d’une éthique dans la relation à toutes les parties prenantes d’un terrain de jeu.
La compétition sportive engage d’abord la personne avec elle-même, en introduisant la notion de performance relative au regard de l’effort consenti. Elle permet de faire l’apprentissage du devenir humain, sachant accepter et vivre aussi bien la victoire que la défaite. Elle peut mettre en scène des tensions existantes hors de la sphère sportive.
Au sein du groupe, les divergences de vue peuvent s’exprimer pacifiquement pour donner naissance à une vision partagée.
Je m’engage pour un sport convivial, social et solidaire et je déclare :
(cocher X)
Principe 1 – Respecter les différences |
Critères déjà respectés |
Engagements de progrès |
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Principe 2 – Favoriser le lien social |
Critères déjà respectés |
Engagements de progrès |
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Principe 3 – Privilégier l’épanouissement des personnes |
Critères déjà respectés |
Engagements de progrès |
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Principe 4 – Transformer l’affrontement en acte en positif |
Critères déjà respectés |
Engagements de progrès |
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