L’injonction paradoxale plonge un individu dans un dilemme insoluble en lui imposant des objectifs qui sont incompatibles : produire toujours plus avec moins de moyens, avoir l’esprit d’équipe quand on individualise l’évaluation du travail, etc. La mutation vers un capitalisme financiarisé engendre l’invasion de cette logique paradoxante, non seulement dans les grandes firmes, mais aussi dans des PME, des entreprises publiques et des administrations.
Les auteurs expliquent les origines du phénomène (révolution numérique, financiarisation du capitalisme), avant de passer en revue toutes les dimensions de la révolution managériale qui s’est ensuivie (lean management, flux tendus, évaluation des performances, etc.). Grâce à leurs enquêtes menées en entreprise, ils analysent la difficulté de vivre dans une organisation paradoxante aux effets ravageurs pour la santé (stress, burn out, dépression). Leur diagnostic sur les méthodes défensives déployées par les salariés est inquiétant : une adaptation réussie (qui diminue la souffrance) contribue aussi à entretenir le système en anesthésiant la résistance. Ils proposent des pistes pour une résistance susceptible d’inspirer les managers soucieux de sortir d’un système qui se retourne contre les intérêts à long terme des entreprises.
Vincent de Gaulejac, directeur du Laboratoire de changement social et professeur de sociologie à l’université Paris-VII, auteur d’une quinzaine d’ouvrages, préside le Comité de recherche de sociologie clinique à l’Association internationale de sociologie.
Fabienne Hanique, chercheur au Laboratoire de changement social et maître de conférences de sociologie à l’université Paris-VII, a notamment publié Le Sens du travail (Érès) et codirigé La sociologie clinique : Enjeux théoriques et méthodologiques (Érès)
Le capitalisme paradoxant
Un système qui rend fou
Vincent de GAULEJAC, Fabienne HANIQUE
Seuil