« Mieux vivre, ensemble »
Pourquoi le convivialisme ?
Parce que le monde part à la dérive et qu’aucune action collective visant à y remédier ne peut aboutir si tous ceux qui s’y engagent ne sont pas animés par un ensemble de valeurs communes clairement partagées.
Les doctrines politiques héritées (libéralisme, socialisme, communisme, anarchisme) ne sont plus des guides suffisants aujourd’hui parce qu’elles ne nous disent rien de décisif ni sur la finitude des ressources naturelles, ni sur la mondialité et la pluralité des cultures, ni, enfin, sur la bonne manière de juguler l’aspiration infantile à la toute-puissance (ce que les Grecs anciens appelaient l’hubris) inhérente au désir humain.
Il nous faut donc innover.
Abrégé de convivialisme
Le convivialisme, philosophie politique de la vie en commun (de la convivance), de l’art de coopérer en s’opposant sans s’entretuer, explicite les valeurs ultimes qui animent tous ceux, de provenances idéologiques très diverses, qui ne se résignent à abandonner la maîtrise, et donc la survie du monde, ni aux chantres de la globalisation néolibérale, ni aux prophètes d’un nationalisme fascisant (les deux allant parfois, voire souvent de pair).
Les premiers, qui œuvrent à l’extension planétaire d’un capitalisme rentier et spéculatif, aspirent à la toute-puissance économique, à toujours plus de richesse. Ils saccagent la planète.
Les seconds mobilisent le désir de toute-puissance politique et identitaire. Ils secrètent la haine et les pulsions meurtrières.
Cinq principes + un impératif catégorique
Les personnalités intellectuelles, associatives et politiques (300 de 33 pays différents) qui sont co-signé le Second manifeste convivialiste se sont accordé sur cinq principes :
– Le principe de commune naturalité affirme que nous ne sommes pas « maîtres et possesseurs de la nature » mais faisons destin commun avec elle. Il est au cœur de la pensée écologique.
– Le principe de commune humanité (qui évoque le communisme) condamne toutes les discriminations, de sexe, de couleur de peau, de croyance ou de religion.
– Le principe de commune socialité (cher au socialisme) affirme que la richesse pour les humains est d’abord celle de leurs rapports sociaux.
– Le principe de légitime individuation (particulièrement revendiqué par l’anarchisme) pose que la motivation première des humains est la quête de reconnaissance.
– Le principe d’opposition créatrice est celui qui animait le premier libéralisme. C’est lui qui a permis d’en finir avec les monarchies absolutistes et avec les despotismes.
Ces cinq principes doivent être tempérés et équilibrés les uns par les autres, dans le respect premier de l’impératif catégorique de lutte contre l’hubris, contre la folie des grandeurs.
Quatre implications politiques minimales
De ces cinq principes et de cet impératif découlent quatre orientations générales minimales pour une politique inspirée du convivialisme :
– Viser à l’horizon 2040-2050 un objectif écologique triple zéro : zéro émission nette de gaz à effet de serre ; zéro consommation d’énergies fossiles ; zéro déchets hautement toxiques et à risques majeurs.
– Mener une lutte résolue en faveur d’une réduction significative des inégalités. Ce qui implique l’instauration inconditionnelle d’un revenu minimum et la fixation tendancielle d’un plafond de revenu et de patrimoine, aussi élevé puisse-t-il être, dès lors que leur montant serait majoritairement perçu comme moralement (ou socialement) inacceptable.
– Redonner vie à l’idéal démocratique en articulant systématiquement démocratie représentative parlementaire, démocratie d’opinion et démocratie directe et participative (via des conférences de citoyens et des référendums d’initiative citoyenne, et en instaurant une démocratie effective dans l’entreprise.
– Promouvoir un universalisme pluriel (un « pluriversalisme ») qui permette aux différentes, cultures, religions ou philosophies de dialoguer en s’opposant sans s’entretuer.
Comment
Une société convivialiste, post-néolibérale ne pourra naître pleinement que si une majorité de personnes voient clairement ce qu’elles ont à y gagner, comment elles y vivraient mieux. C’est à elles de déterminer ce qu’elles veulent rejeter de la société actuelle, ce qu’elles désirent en conserver, et en quoi il faut innover.
Ces discussions peuvent s’opérer partout : sur les lieux de travail ; dans les associations ; dans les entreprises de l’économie sociale et solidaire ; dans les partis politiques. Rappelons que sous la Restauration (1815-1830), et sous la Monarchie de Juillet (1830-1848) s’organisaient des banquets républicains ou citoyens. Ce sont eux qui ont entraîné la chute de Charles X en 1830, puis celle de Louis-Philippe en 1848, donnant ainsi naissance à la Deuxième République. Pourquoi en écho à ces banquets républicains, ne pas organiser aujourd’hui des banquets convivialistes dans lesquels pourraient s’exprimer effectivement les aspirations et les suggestions de tous les citoyens soucieux de la chose publique et de l’avenir de l’humanité ?
Chacun des réseaux associatifs, civiques et politiques qui se reconnaissent dans un tel projet pourrait en être l’organisateur là où il est suffisamment implanté. À charge pour lui, simplement, de rédiger un compte rendu synthétique et de le porter à la connaissance de tous.
N.B. Le convivialisme n’est en rien une doctrine prétendant avoir réponse à tout et fournir des recettes politiques qui vaudraient à tout coup. Mais il permet de poser les questions dans un cadre théorique partagé et de tester la cohérence et la recevabilité des mesures politiques qui seraient proposées par tel ou tel acteur civique ou politique.